« On croyait savoir tout sur…

l’amour depuis toujours », chantait l’artiste du Sud-Ouest, Francis Cabrel, dans Sarbacane.

Mais de la sarbacane de l’artiste doux-rêveur (en 1989) aux tirs d’artillerie de 2022 ou 2023, il y a quand-même un fossé !

On croyait tout savoir sur l’info depuis toujours. Ou du moins, plus modestement, on croyait avoir compris le sens de l’histoire. C’était il y a deux ans et chacun, professionnel ou non du pronostic vital en temps de conflit armé, y allait de son pronostic.

Vous verrez, le camp russe va écraser le camp ukrainien. Et pour les plus romantiques encore, c’était le pronostic inverse qui était posé. Blitzkrieg nouvelle génération. Car l’union sacrée des « forces du bien » (les célèbres gentils occidentaux) allait faire manger la poussière à l’équipe poutinienne. Vite fait, bien fait !

Tout faux !

Tout faux, c’est la claque. La claque qui fait mal et, surtout, nous rend rouge de honte. Un peu comme lorsque ce prof nous rend notre copie, maculée de commentaires atterrés, de points rouges d’interrogation ou d’exclamation ! Le prof, sidéré par notre nullité, a craqué…

C’est dur à admettre, nous avons sombré, échoué. Mais comment a-t-on pu manquer autant de clairvoyance ? Qu’est-ce qui nous valu un tel échec, un tel oubli d’intelligence et de savoir-faire ?

En fait, nous n’avons juste pas compris. Pas compris la mécanique d’une entrée en guerre. Trop naïfs ou trop attachés à notre petit confort personnel. Des historiens, des personnes qui réfléchissent, oui, qui réfléchissent au cours des événements. Eux seuls n’ont pas éteint leur pensée critique face à ces événements et cette hystérie. Les déclarations sur des airs de « vous allez voir », les promesses, les postures d’autosatisfaction, très peu pour eux…

Ecouteriez-vous aussi béatement que vous écoutiez les chaînes d’information, votre artisan ou votre vendeur automobile ?

– « Vous verrez, dans une semaine les travaux seront finis. »
– Ou encore : « vous allez voir, vous allez faire facilement 30% d’économies tous les ans. Vous aurez amorti votre achat en deux ans ! » Blablabla…

On se croirait presque acteur de la fameuse fable du Corbeau et du Renard. Mais le renard, le filou, le beau-parleur ce n’est, hélas, pas nous… Comment a-t-on pu se laisser enfumer ? Qui a donc décidé de ce long conflit. En théorie, c’est nous, puisque nous sommes en démocratie ! En pratique, c’est bien plus discutable. Le peuple souverain a-t-il été jusqu’à tenir la main aux décideurs, les invitant à nous « montrer l’exemple » ? Le chef du camp ukrainien l’a-t-il fait ? Non, mais il a su s’habiller en treillis et il a su se mettre en scène, sur les pas scéniques d’un Poutine habitué à s’exhiber torse nu avec des ours !

A-t-on vu les enfants de banquiers, de marchands d’armes, de généraux ou de ministres aller montrer l’exemple, au nom de l’union nationale ? En 1914 ? En 1939 ? A quand des sorties scolaires organisées par l’école Alsacienne ou par Louis-le-Grand en première ligne, à Gaza ou dans l’Est de l’Ukraine ?

On nous avait vendu. Oui, simplement vendu une idée. Une idée grotesque, mais « plus c’est gros et plus ça passe ». C’est notre côté grand enfant, collectivement ! On retombe en enfance et dans un instant d’égarement on se remet à croire au père Noël ou aux superhéros.

Depuis combien de temps les guerres menées par nous, les Occidentaux, ont-elles abouti à un succès militaire ? Depuis combien de temps a-t-on échoué à garder le peuple du camp d’en face (Irak, Afghanistan, Syrie, Libye…) de notre côté. A respecter les civils ? Le but d’une intervention militaire étant, en principe et selon le droit international, de s’en prendre principalement aux force armées d’en face, pas aux populations innocentes !

Mais inutile de chercher beaucoup plus loin. On a bien sa petite idée en mode « à qui profite le crime ».
Et si le Sud global ne fait plus confiance en l’Occident, USA en tête, c’est aussi du fait de notre inconsistance, notre inconscience générale et, finalement, notre non respect des règles que nous cherchons à infliger au reste du monde. Faites ce que je dis, ne faites-pas ce que je fais…

Laurent

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