La crise et le caméléon

Dernièrement le très sérieux magazine L’Express a lancé un numéro spécial intitulé « Comprendre 40 ans de crise« . Quarante ans, c’est affreusement long ! Mais ces brillants journalistes ont peut-être commis une erreur, en parlant de « crise » au singulier. Est-ce volontairement pour ne pas trop nous inquiéter ?? Dans un pays angoissé comme la France, classé par Geert Hofstede parmi les pays à « fort contrôle de l’incertitude » (d’où notre amour viscéral pour les empilements législatifs, les règles et les normes), se dire qu’on n’a fait que ça : traverser des crises, depuis tant d’années, quelle misère !!40 ans de crise

Crises pétrolières, donc énergétiques mais pas seulement (vu les multiples débouchés du liquide noir : médicaments, plastiques et autres produits phytosanitaires). Crises économiques, boursières, alimentaires, sanitaires, etc. L’Express, même en version historique, reste assez discret sur la question plus profonde, existentielle, morale : la crise du sens ! Car au lieu d’être entrés en crise(s), nous tournons en rond. Mais attention : cette crise-là n’est pas politiquement correcte. Et ne rentre pas dans les cases préformées de notre société moderne.

Cette autre crise dérange. Nous avons assez de problèmes comme ça pour qu’elle ne débarque dans le débat, en pleine place publique. Et revoilà sa voisine, ladite crise spirituelle, demeurant étouffée, laïcité oblige. Nietzsche et son idée de la « mort de Dieu » doit encore se retourner dans sa tombe ! Que ses descendants se rassurent : l’humain n’a pas fini de se projeter spirituellement. Dormez tranquille, la technologie est notre nouvelle religion (faute de quoi on est taxé de ringard). La « techno » a débarqué avec ses gros sabots pour combler le vide spirituel. Et nous voilà partis à rêver de robots à tous les étages, d’imprimantes 3D à chaque coin de rue, de voitures connectées, volantes, d’implants électroniques. Elle va nous sortir de la crise, la techno… vous allez voir ce que vous allez voir, nous disent les plus enthousiastes (étymologiquement, ceux qui ont dieu en eux !)

Stop ! Revenons sur terre. Quelle naïveté, quel beau projet illusoire pour nostalgiques de science-fiction. Car oui, nous le savons tous, le monde est fini. Et le progrès, lui, est-il fini ? Dans ces conditions, la crise n’est pas prête de s’arrêter. En effet, plus nous resterons dans le déni, centré sur nous-mêmes et sur le temps court, plus la crise s’étendra, changeant de couleur à l’image du caméléon, qui n’arrête pas de nous étonner. La techno est faible face au poids de nos habitudes et notre résistance au changement. Ah, la crise, quelle peste ! Au fait…il est où le « pesticide », le remède miracle ?

Laurent

Lire aussi : Pierre Rabhi, Paul Ariès, Jeremy Rifkin, Geert Hofstede

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