On classe souvent nos lectures en deux catégories : d’une part les livres et autres revues « de vacances », si légers et dépaysants ; d’autre part les ouvrages « sérieux », ceux des bonnes résolutions de la rentrée, utilitaires à souhait. Publié en 2013, L’extraordinaire voyage du Fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea, de Romain Puértolas, ne rentre dans aucune case !
Après la légèreté du début et une intrigue qui démarre en trombe, parsemée d’humour et de dérision, la course-poursuite burlesque du Fakir, policiers et gitans aux trousses prend vite d’autres couleurs. Très vite des tons plus sombres et graves comme la vraie vie peut l’être. Et un sentiment de fragilité. L’extraordinaire voyage (…) imaginé par Romain Puértolas est ponctué d’anecdotes réalistes, de clins d’œils sincères à la réalité de ce qui se passe de part et d’autre de la Méditerranée.
La vie ne tient qu’à un fil, et les hommes nous sont présentés mi-prédateurs, mi-solidaires. Mi-animaux sociaux, mi-solitaires. De Calais à Lampedusa, des côtes libyennes ou syriennes au littoral de Sud de l’Europe, Romain Puértolas ne nous permet pas de tout oublier, ce qui serait le propre du bon bouquin de vacances. A la place du Fakir, nous sommes pris au piège de cette armoire Ikea qui ne nous lâche pas, tant l’intrigue est bien ficelée. Le suspens inoxydable, et la morale de l’histoire nous tient en haleine. Quitte, au passage, à nous faire réfléchir au sens des relations dites « Nord-Sud », entre procédures policières et générosité façon Croix Rouge Internationale.
L’extraordinaire voyage du Fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea. Des personnages aux liens inattendus. Un héros qui nous charme voire nous hypnotise. Un héros qui finira par dépasser son narrateur, fort de son don de prestidigitateur. Au final, une synthèse pleine de philosophie et de vitalité. Sans oublier la classe des récits fantastiques à la Jules Verne. Il paraît que les vacances d’été se terminent. Alors c’est peut-être le moment idéal de lire ou relire ce roman hybride, ô combien d’actualité !
Laurent