VW, voiture du peuple et mensonge vert

Qu’il est difficile pour certains individus de s’excuser publiquement, sous la pression des investisseurs et sous le regard acéré des médias. Ainsi Martin Winterkorn, l’ex-patron de Volkswagen, n’a pas su ou pas voulu clairement s’excuser auprès de ses millions de clients dans le monde, à commencer par les clients américains ! Ce qui lui aura valu d’être remercié, et vite…

Dans quelques semaines certainement, la plupart des gens aura oublié ce grand scandale de la rentrée. Un secret de Polichinelle qui aura eu la délicatesse d’éclater juste au lendemain du Mondial de l’Automobile de Francfort. Le « mensonge vert » du Groupe Volkswagen a fait surface alors même que se jouent des négociations ultra-secrètes entre les Etats-Unis et l’Union Européenne au sujet du sacro-saint libre-échange. Or sans sombrer dans la paranoïa, il est probable qu’en pleine guerre économique, l’Union Européenne, défendant bec-et-ongles sa vision des normes – considérées par les libre-échangistes comme des « barrières non-tarifaires », autrement dit des entraves à la concurrence internationale – ait reçu cette affaire VW en pleine face « pour la peine ». Une superproduction « à l’américaine » ? Dans le sillage de la grande bataille des normes, qui sont loin d’être uniformisées au plan mondial !

Qu’on se souvienne de l’affaire du Concorde, fleuron technologique européen, jugé « trop bruyant », par les autorités américaines. C’était dans les années 1970. Et déjà la pollution servait de prétexte à ennuyer des rivaux économiques. Aujourd’hui, des mastodontes comme Google et Apple se ruent sur le secteur automobile et font trembler les géants du secteur. Et le nationalisme économique n’a pas disparu des radars ! C’est que dans la grande compétition internationale, tous les coups sont permis. Que celui-ci tombe dans un secteur stratégique, l’automobile, et dans la première puissance économique et exportatrice d’Europe, n’est peut-être pas un simple fait du hasard.

Le « mensonge vert » de Volkswagen fait doublement tâche : il déplaît et dérange autant aux Etats-Unis, pays arc-bouté sur la réglementation et très irritable en matière de fiscalité (qu’a donc fait VW avec l’argent du contribuable Américain ?) qu’en Allemagne, où la triche est culturellement très mal vue !

Il n’aura échappé à personne que la place de l’automobile taraude les gouvernements du monde entier, à l’heure des mégalopoles et des smogs en série. A l’heure où des liens apparaissent de plus en plus clairement, malgré les écrans de fumée de la mauvaise foi, entre l’activité industrielle et les transports polluants d’une part, et les problèmes sanitaires et leur coût, d’autre part. Dans le même temps, le très traditionnel secteur automobile se voit attaqué frontalement par des usages nouveaux (aspects culturels, rapport à la voiture qui change) et par de nouveaux services (innovations technologiques, et revoilà Google, Apple et une armada de startups de la « mobilité durable »).

dieselgate_volkswagenLe « green washing » – cette fâcheuse tendance à « faire semblant » d’être propre, à paraître plus vertueux au plan de environnemental qu’on ne l’est réellement – revient sur le devant de la scène. Or il n’existe toujours pas de « police mondiale » de l’environnement. Seul compte le volontarisme des ONG les plus virulentes, et des lanceurs d’alertes comme Avaaz. Au fond, on croirait à travers le cas VW, que le sentiment d’impunité de certaines multinationales, qui se croient au-dessus des lois nationales, leur empêche de comprendre la portée de leurs exactions. Un peu à l’image d’un enfant, arc-bouté sur son déni, incapable de reconnaître ses fautes.

Les constructeurs automobiles allemands sont certes puissants et dominants au plan commercial, cela ne leur aura pas empêché de s’endormir sur leurs lauriers technologiques. Et de se vanter de leur qualité irréprochable, en allemand comme il se doit ! Pendant que d’autres, Tesla Motors ou Renault-Nissan en tête, innovaient dans l’électrique. L’arrogance des uns déchaîne les passions des journalistes et des commentateurs qui nous vendent aujourd’hui la saga du « Dieselgate ». Mais quelque soit le succès de VW pour limiter la casse face à la justice américaine, bientôt cette parenthèse honteuse se refermera. Jusqu’à la prochaine affaire. Jusqu’au prochain bulletin de santé mondiale, signé par l’OMS.

En attendant, l’heure des comptes a sonné, c’est la fin de la récré ! On dit souvent qu’il n’est pas bien de mentir, ou qu’il faut savoir le faire « intelligemment » pour ne pas se faire prendre. Cette fois il semble que ce soit râté. Mais l’industrie allemande est loin d’avoir dit son dernier mot. Et un élan de fierté nationale devrait très vite relancer la machine ! Quant aux gouvernements de part et d’autre de l’Atlantique, ils vont devoir apprendre à accorder leurs violons et affirmer, sur la durée, leur courage et leur autorité. A commencer par une harmonisation des normes et une définition réaliste (adaptée aux conditions normales de conduite) des tests d’homologation, ce qui est loin d’être le cas…

Laurent

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