Besoin d’un petit réveil médiatique ? La télévision a chez vous un effet soporifique ou, pire, abrutissant ? N’en jetez plus ! Et branchez vous, si vous en avez – encore – le courage, sur l’émission animée par Elise Lucet. Cash Investigation. Le ton est donné : c’est très direct, sans fard ni politiquement correct ! Et c’est bourré de poil à gratter… Comme toute émission d’investigation, l’action se passe sur le terrain, loin des studios feutrés. Business du sucre, marketing, tabac, lait infantile, diesel, formation professionnelle… Tout y passe. Manipulations, désinformation, escroqueries, mensonges : voilà ce qui semble passioner la journaliste et sa bande. Autant de comportements inavouables que ces journalistes n’excusent pas ! Elise Lucet, au regard illuminé, semble s’être vue confier une mission suprême d’intérêt général. Pour régler leurs comptes à tous ceux qui « abusent ».
Mais quelle mouche a piqué Elise ? Qu’est-ce qui lui prend de traquer, tel un fox terrier ou un pittbull, les entreprises ou les institutions qui, selon elle, dépassent les bornes ? Sans retenue, Elise met les pieds dans le plat. Veut-elle redonner des leçons de courage au monde médiatique ? Ses reportages sont on ne peut plus virulents, acharnés et jusqu’au-boutistes. Assoiffée de vérité, elle repousse l’exercice journalistique jusque dans ses derniers retranchements. Avec une approche para-militaire du journalisme, du style « on n’a rien sans rien ». Au risque de se brûler les ailes et de se faire déglinguer par la direction de l’antenne ?
Mais France 2 n’est pas tout à fait TF1 ni même Canal Plus. Alors en attendant, les curieux de France et de Navarre pourront se rassasier de cette lutte sans fin. A coup sûr, ils apprécieront cette tentative d’éclairer le grand public endormi, trompé à longueur de temps par la sphère politico-médiatique. Les curieux qui ne tolèrent plus ce vocabulaire d’énarques ou, comme dirait Alexandre Jardin, de « mini-Colberts », tellement déconnecté du réel. Avec ce genre de reportage, soudain c’est une grande bouffée d’air frais qui réinitialise notre sens critique et nous remet en alerte. Notre capacité de jugement, appuyée sur une information alternative, éloignée de la « pensée unique », refait surface comme par miracle. Mais attention au réveil brutal qui se paie « cash », au prix de beaucoup d’inconfort, d’énervement voire d’indignation !
Bon. Pour les travers du sucre ou du tabac, on savait déjà… Les méfaits du lait infantile ou du diesel, là non plus ce n’est pas vraiment un scoop… Alors vas-y, Elise, encore un petit effort de curiosité ! A quand un reportage sur les dessous de la « guerre contre le terrorisme » ou sur le business des armes à la française ? A quand une enquête sur les liens particuliers entre la France et le Mali, entre opérations antiterroristes et extraction de minerai d’uranium ? Quoi, tu hésites, Elise, tu as peur ? Trop compliqué, trop délicat… pas assez populaire ? Pourtant, tu les sais bien, d’ici à ce qu’un Patriot Act liberticide ne vienne dézinguer l’information indépendante, l’alerte ne doit-elle pas être lancée ? Car ensuite il sera sûrement trop tard. Puisqu’aujourd’hui la question sécuritaire a raflé la mise… allez Elise, au boulot !
Laurent