Chers Valentines, chers Valentins,
Dépêchez-vous, ça va être votre fête ! Après les soldes…c’est l’heure des opérations commerciales du coeur. Car il faut bien monétiser l’événement du 14 février.
Quelle chance d’être un Valentin ou une Valentine. Jeunes tourtereaux, alors qu’on ne parle que de crise, vous prétendez pouvoir « vivre d’amour et d’eau fraiche ». Naïveté ou utopie ?
Pourtant, n’est-ce pas merveilleux ? La vie rêvée, celle des amoureux à la manière « sobre et heureuse » de Pierre Rabhi ou de qui vous voulez. Mais quelle mouise pour tous les marchands de superflu, quand entre dans leur boutique un Valentin ou une Valentine.
Il ne suffisait pas que la concurrence des vendeurs de pacotille soit rude. Par-dessus le marché – les neurosciences le prouvent – le bonheur amoureux transcende ! Rend le client du 14 février invincible, irrésistiblement détaché des contraintes matérielles. Son smartphone peut bien être cassé, son scooter en panne… et alors ? ça plane pour lui…
Valentin et Valentine ont une attitude moralement peu recommandable, limite asociale. Des utopistes d’une autre époque ? Quand ils aperçoivent une pub sur les rencontres « extra-conjugales » ou préparent un exposé sur le « marché du désamour et de l’infidélité »… au fond d’eux ils ne peuvent s’empêcher de rire ! Un rire incontrôlable, un rire léger comme eux.
Amateurs de PIB, voici l’ennemi public numéro 1 : le grand amour. Pas l’amourette qui vous met dans un état second de manière éphémère. Le vrai, « the one », celui qui fait « tourner la tête ». Commercialement criminel, il rend chacune de ses « victimes » terriblement altruistes, et totalement désintéressées. Désintéressées ? Malédiction pour les épiciers : la belle émotion nous ferait presque oublier de manger… c’est dire la catastrophe économique. Elle annihile nos pulsions consuméristes ! Horreur, elle met k.o. le puissant marketing. Valentins et Valentines, un bien mauvais coup pour la croissance ! Cauchemar pour les médias et les annonceurs : le « temps de cerveau disponible » est à zéro en ce 14 février !
Valentins et Valentines sont donc des rêveurs. Mais attention à ne pas s’y méprendre ! Leur pouvoir (comme leur amour) est sans limite. Car ils ne voient pas le monde comme les autres. Contrairement à notre société atteinte de myopie dégénérescente, eux voient loin « pour la vie, pour toujours ». Et ça dérange…
A l’école déjà, les amoureux de la vie portaient un regard critique, différent. Leurs profs les jugeaient indisciplinés et trop dissipés. Pfff ! Plus tard ils allaient s’affirmer en « éléments subversifs ». Car en grandissant, nos doux rêveurs s’endurcirent pour mieux préserver de leurs rêves. Goût du business oblige, ils deviennent entrepreneurs pour mieux défendre leur vision du monde. Quelle audace ! Evidemment, devenus adultes, Valentins et Valentines n’ont pas perdu de vue ce qui a du sens. Ils savent de temps en temps revenir sur terre, mais à leur manière.
Nos doux rêveurs ont souvent la tête dans les étoiles. La beauté du monde les inspire et les nourrit. Ils restent d’un optimisme insolent qui guérirait les plus dépressifs. Tant pis pour la croissance du PIB. La crise ou l’apocalypse, très peu pour eux !!
Laurent
quoiqu’il en soit cela fait du bien d’être amoureux et d’y croire pour longtemps !!!!