Rien de plus actuel que la fuite ! Fuite en avant, fuite des capitaux et des cerveaux. La fuite est d’abord mal perçue, elle inquiète autant qu’elle est souvent jugée douteuse. Voire immorale ou égoïste. Pourtant, la fuite répond à un réflexe vital lorsqu’un individu se sent en danger ou se sent menacé. Elle a été théorisée en 1976 par Henri Laborit, auteur d’Eloge de la fuite.
« Se révolter, c’est courir à sa perte, car la révolte, si elle se réalise en groupe, retrouve aussitôt une échelle hiérarchique de soumission à l’intérieur du groupe, et la révolte, seule, aboutit rapidement à la soumission du révolté… Il ne reste plus que la fuite. »
Au départ il s’agissait simplement de retrouver un espace de vie meilleur, plus adapté à nos valeurs et à nos besoins. Au départ, la fuite était salvatrice et son utilité incontestable. C’est parce que l’homme est mû par un désir que sa poursuite l’entraînera, parfois voire souvent, à fuir. Fuir pour survivre ou pour grandir, cherchant à voir si l’herbe, ailleurs, n’est pas « plus verte » !
La hiérarchie dont parle Laborit dans son Eloge de la fuite, ce n’est peut-être pas qu’un pouvoir hiérarchique au plan professionnel. On pourrait inclure la hiérarchie très personnelle et privée de nos besoins et de nos valeurs. Aussi, dès lors que les valeurs matérielles prennent le dessus sur tout le reste, l’individu fugitif en puissance rongera longtemps son frein. Si la fuite au sens d’un changement professionnel apparaît comme une évidence, une autre fuite, plus intime et plus profonde, semble nettement plus délicate. Tel un virage serré qui peut surprendre, plus difficile à négocier que d’ordinaire.
Rappelons que le contexte, depuis la publication de l’essai de Laborit 1976, a quelque peu changé. L’environnement économique et social s’est durci, l’horizon de l’avenir semble s’être assombri. Alors ce qu’il convient d’appeler « crise » rend plus difficile la fuite. Faut-il davantage se battre, voire se débattre, se révolter ? Ou vaut-il mieux prendre son courage à deux mains et partir ? Certes quelques utopistes, las de vivre médiocrement, ont pu partir loin de chez eux et changer de vie. Pour les autres, la fuite, oui peut-être, mais pas à n’importe quel prix !
Laurent
Quoiqu’il en soit fuir a un prix, fut-il même de faire des économies d’impôt comme le suggère et l’appliquera très probablement Florent Pagni !!!