Au départ, tout semblait les opposer. D’un côté, l’écolo, doux rêveur, parfois colérique, trop souvent dogmatique, si souvent marginal ! L’empêcheur de tourner en rond, l’anticonformiste, le pauvre allergique aux pollutions des temps modernes. Pensez à ces écolos qui peuplent les partis politiques du style EELV ou qui se cachent, de peur qu’on leur tombe dessus, et dissimulent leur mal-être social au fond du Larzac ou au sein d’une ONG hyper-activiste. Vraiment, à première vue, tout oppose l’écolo de l’épicurien de base.
Lui l’épicurien, jouit d’une image hautement consensuelle. Il est le chouchou de la société des loisirs et de la consommation de masse ! L’épicurien des temps modernes, contrairement à l’écolo, représente l’archétype du citoyen « light » doublé d’un jouisseur-consommateur je-m’en-foutiste et court-termiste (façon « après moi le déluge »). On prêterait presque à l’épicurien de notre époque le désir illusoire de finir sa vie sur Mars, au besoin et « au pire », s’il s’avérait que sur Terre, sa survie soit compromise. Tout semble – a priori et dans notre imagerie populaire – opposer d’un côté l’écolo ascétique, ce maigrichon décroissant à tendance dépressive, et de l’autre, le bon vivant, joyeux épicurien, qui vit à 200% dans l’ici et maintenant ! Ah, ce que les stéréotypes ont la vie dure ! Est-il donc impossible de tenter un rapprochement entre l’écolo et l’épicurien ?
Jusqu’à ce qu’un petit détour historique nous rappelle la vie d’Épicure, au cœur d’une Grèce Antique en mode « fin de règne ». Une civilisation en pleine débâcle, qui se montra particulièrement intolérante aux idées véhiculées par ce pauvre bougre d’Épicure. Quelles étaient ces idées ?
- Tout d’abord, qu’il faut aimer la vie et en profiter sans attendre
- Ensuite, qu’il ne sert à rien de passer son temps à désirer ce que l’on n’a pas, au risque de ne jamais trouver le plaisir qui pourtant nous tend les bras
- Qu’il existe une multitude de « petits plaisirs », à commencer par le bon temps passé entre amis… tout simplement !
Alors Épicure n’était pas celui qu’on imagine vaniteux, irresponsable et autocentré. L’épicurien doit profiter de la vie mais en maîtrisant ses envies, et en se contentant des plaisirs « naturels et nécessaires ». A la différence des hédonistes qui cherchent tout bonnement à maximiser leur plaisir, à rapprocher peut-être aux pulsions consuméristes et aux pratiques addictives de notre société actuelle. Dans ces conditions, et si Épicure nous avait soufflé l’idée d’une « consommation raisonnée », voire d’une vie en mode « slow life » ? Et si Épicure, proche de l’essentiel, n’en était pas plus proche des amoureux de la vie et de la nature que sont certains « écolos » et autres « sobres et heureux » ?
Laurent
Beaucoup de vérité dans vos réflexions 🙂
Sur cette question du bonheur personnel, je viens de poster un article sur lequel j’aimerais avoir votre avis : https://jeanpaulgalibert.wordpress.com/2015/10/12/pouvez-vous-faire-votre-bonheur-vous-meme/
Bonjour, vous posez la question d’une certaine protection et de l’autonomie, la liberté, comme voie d’accès au bonheur (le mot personnel est presque de trop, car en dehors du bonheur personnel, existe-t-il un bonheur collectif ?? sauf peut-être au Bhoutan… pays du BIB !)
J’ai un peu de mal avec votre tout dernier paragraphe, qui à mon sens fait un peu trop conclusion rapide et manque de transition et de lien avec les idées exposées dans les paragraphes précédents. Cordialement
Quel réconfortant édito que devrait lire tout écolo pour convaincre les épicuriens certainement plus nombreux, de leurs points communs, suscitant ainsi l’UNION plutôt que le désunion ou l’indifférence et leur offrant la possibilité d’augmenter le nombre de leurs voix aux prochaines élections !!!!
Bravo pour ce retour aux sources concernant l’épicurien et grâce à vous je me sens très épicurienne
Bien cordialement
Renée
On devrait plus souvent relire le dictionnaire et les philosophes dans le texte plutôt que d’utiliser les mots dans leur sens détourné. Très bon article, Laurent.
Merci Laurent pour cet article qui remet en perspective ces notions et réconcilie finalement bonheur et sagesse!