Qui se souvient de ses cours d’histoire ? Comment l’Empire romain s’est-il formé, a-t-il étendu son territoire et son prestige, avant de chuter ?
Stefan Molyneux, qui sévit sur Internet avec une vision décalée du monde et de son histoire, a récemment revisité le développement et la chute de Rome. Au passage, il a pris un certain plaisir à rappeler que l’on devrait davantage faire le lien entre la décadence antique et la stagnation (voire le déclin) de notre société actuelle.
Molyneux, diplômé en Histoire à Mc Gill et à Toronto, dépeint la dégradation économique de l’Empire romain sous un angle fiscal et monétaire. Ainsi, il relate comment la population a été progressivement étouffée par un nombre croissant de taxes. Avec moult détails, il rappelle cyniquement qu’au début de l’Empire, deux ou trois jours de labeur par an suffisaient à s’acquitter du fisc romain. Il souligne aussi l’inflation, basée sur l’extension de la masse monétaire et la dépréciation de la monnaie. Son propos est aussi simpliste qu’efficace a priori : la nouvelle monnaie (au contenu appauvri en argent) est venue au fil du temps remplacer l’ancienne monnaie (riche en argent). Si bien que les barbares eux-mêmes, progressivement incorporés dans l’Empire (via l’esclavage et via l’armée), conscients de cette dépréciation et peu confiants, exigeaient à ne pas être payés en « monnaie de singe » mais en or !
Plus loin, Molyneux tente un parallèle entre sa version de l’histoire romaine et notre histoire contemporaine. Cette fois il s’agit des délocalisations. Car au fur et à mesure de l’enrichissement (aujourd’hui on dirait la croissance du PIB) de l’Empire, il a fallu recourir à de la main d’oeuvre moins coûteuse en s’éloignant du coeur de l’Empire. Au final, nous avons cette représentation (au moins partiellement vraie !) d’une société romaine devenue oisive et assistée. Représentation contenue dans l’expression « du pain et des jeux ». A contrario, dans les provinces « barbares » du pourtour de l’Empire, les populations étaient à la fois plus travailleuses et avaient moins de prétensions salariales (ce qui au passage contredit quelque peu l’idée de vouloir être payé en or, mais bon !)
Molyneux, qui ne cache pas son penchant « libertarian », oppose la discipline, qui semble avoir au cours de l’histoire romaine disparu de la gouvernance de l’Empire, au laxisme caractéristique de l’état providence de l’époque ! Mais peut-on parler d’état providence dès l’Antiquité ? En tout cas, si l’on ne s’en tient qu’à la dynamique et aux tendances, cela paraît assez vraisemblable. Et d’après ce bloggueur canadien, le système économique aurait fini par étouffer sous une bureaucratie de plus en plus écrasante, comme celle qui aura été fatale à l’URSS. Comme celle aussi qui exaspère tous les détracteurs du « machin » européen, de l’état français ou encore de l’état fédéral US, alias la bureaucratie de Washington.
Alors au fond, les puristes pourront toujours chercher des noises à ce type de relecture de l’Histoire. Mais s’il fallait bien admettre une chose d’à peu près valable, c’est l’idée aussi simple qu’effrayante à première vue de cycle de vie. Autrement dit que tout système politique et économique connaît, sur une période plus ou moins longue, un phase de développement suivie d’une stagnation (âge « adulte », avec ses croyances et ses dogmes), qui conduit au déclin.
Sur ce, et malgré toutes ces bonnes nouvelles de l’Empire… très bonne année 2017 à tous !
Laurent