Permis de travestissement

Connaissez-vous l’histoire de cette femme « pas comme les autres », née au début du XIXème siècle ? Artiste-peintre, femme libérée, Marie-Rosalie Bonheur, dite Rosa Bonheur, naît le 16 mars 1822 à Bordeaux. Fille d’un professeur de dessin et peintre, elle perd sa mère à l’âge de onze ans. Après l’école élémentaire à Paris, Rosa devient apprentie couturière avant de partir en pension. Son père va ensuite lui permettre de s’initier à la peinture, et Rosa va très vite se passionner pour les animaux. Son premier succès s’intitule le Labourage nivernais. Oubliez les tracteurs surpuissants et leurs charrues qui de nos jours entaillent et brassent le sol en profondeur. Rosa montre la force animale et rappelle l’élégance de ces bêtes de somme. Elle nous rappelle cette forme de complicité entre l’homme et les animaux, ce travail sans relâche et sans artifices.

Son œuvre serait à rapprocher peut-être, dans une approche photographique récente, aux sublimes clichés animaliers de Yann Arthus-Bertrand. A l’aise dans son époque, Rosa Bonheur ne manque pas de toupet pour mettre tout le monde d’accord : romantiques et classiques, qui à l’époque s’écharpaient sans cesse. Chez elle en Seine et Marne, sur le coteau de By, se côtoient de nombreuses espèces animales : mouflons, vaches, chevaux mais aussi sangliers et même un couple de lions !

Les chevaux, on les retrouve exposés au Metropolitan Museum de New York. Peut-être son chef d’œuvre, le Marché aux chevaux (1853) passera au travers de la critique artistique foncièrement masculine à l’époque. Ce tableau est exposé au Musée d’Orsay. Rosa ira jusqu’à être présentée à la Reine Victoria. Grâce à l’Impératrice Eugénie, en 1865 elle devient la première femme artiste à être décorée chevalier (chevalière ?) de la Légion d’Honneur ! Pendant ce temps, la critique continuera à se laisser aller à quelques propos peu galants, tel ce Monsieur Claretie qui déclara en 1874 : « Les femmes peuvent-elles être de grands peintres ? On serait tenté de répondre oui lorsqu’on regarde les bœufs de Rosa Bonheur, et de dire peut-être ou même non lorsqu’on étudie ses figures humaines. »

 

Cheveux courts et souvent décrite fumant un havane, Rosa Bonheur assumera toute sa vie durant son côté « garçon manqué ». Elle vivra avec une femme, Nathalie Micas, et ce jusqu’à la mort de cette dernière en 1889. Puis Rosa se rapprochera d’une artiste-peintre américaine. D’ailleurs elle aura l’occasion de côtoyer Buffalo Bill à l’occasion de l’Exposition Universelle de 1889, à Paris. Afin de pouvoir mieux apprécier ce monde animal qu’elle chérit, elle n’aura de cesse de renouveler ses demandes de « permission de travestissement », pour accéder aux foires aux bestiaux, source inépuisable d’inspiration ! Rosa décède en 1899 à l’âge de 77 ans. Ses tableaux sont visibles aux Etats-Unis, en France et en Pologne.

Permission_de_travestissement_Rosa_Bonheur

Laurent


2 réflexions sur “Permis de travestissement

  1. Magnifique article ! Le tableau de Rosa Bonheur, Attelage nivernais est reproduit dans ma maison de famille. Je le connais depuis toute petite mais je ne connaissais pas toute la vie de Rosa Bonheur. 🙂

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