La population mondiale a très fortement augmenté depuis la fin de XIXème siècle, passant d’à peine plus d’un milliard à six milliards d’habitants en un siècle seulement. Ce grand saut démographique est à mettre au crédit de la baisse de la mortalité, qui a été plus rapide que la baisse de la natalité. Alfred Sauvy, l’inventeur de l’expression « tiers-monde », a fait partie, au XXème siècle, des démographes les plus influents. Selon lui, l’accroissement de la population est « bon pour l’économie », ce qui lui valut l’étiquette de « populationniste ».
Mais à l’heure où un européen moyenne consomme autant que dix sénégalais, la question de la démographie peut facilement effrayer, ou bien donner le tournis. Car on a tous en tête la perspective, moralement fort respectable, d’un monde dans lequel le « tiers-monde » se mettrait à consommer « comme nous ». Il est plaisant de croire dans la technologie, dans le génie humain, pour nous tirer d’affaire face à l’épuisement – prévu de longue date – des ressources. Il est plaisant aussi de croire dans nos capacités à se montrer plus économes et plus solidaires. Mais qu’il est inconfortable de songer aux dures réalités démographiques !
Parmi elles, les perspectives de croissance de la population en Afrique. Un doublement de la population, de l’autre côté de la Méditerranée, semble incontournable. C’est là que s’oppose la vision nataliste d’Alfred Sauvy et d’un de ses contemporains, René Dumont. Le « père spirituel » du mouvement écologiste français a sillonné le monde, entre autres l’Afrique. Il a longtemps plaidé pour le contrôle de la natalité. Et selon lui, le développement, dans les régions du monde les moins développées, repose autant sur des questions économiques (des histoires d’argent) que sur des questions démographiques et éducatives. En cela il rejoint l’expérience de Pierre Rabhi, notamment au Burkina Faso, le « pays des hommes intègres ».