Joyeux anniversaire, ô Jupiter

Il y a bientôt un an, un miracle marketing des laboratoires En Marche s’est produit. Un parfait alignement des planètes du système politique français allait permettre au candidat Macron, in extremis, de terrasser les principaux rivaux. D’écarter François Fillon en tête, allez savoir par quelle « chance du débutant » ou « hasard du calendrier » juridico-médiatique. A moins qu’un cabinet noir, à l’Élysée, n’ait fait le « sale boulot » ? La baraka de l’équipe d’En Marche allait donner des ailes à son candidat, en finale, face à la leader du FN. Affaire classée.

La fin justifie les moyens. Un système économique et politique en pleine déroute aura donc réussi à sauver les meubles et les apparences, en intronisant le vaillant Emmanuel. Et pour la gloire, le peuple et les journalistes se souviendront du sacre d’Emmanuel 1er. On se souviendra de cette image solennelle du locataire de l’Élysée. Pas peu fier de sa victoire, le Président, en marche vers la Pyramide du Louvre…

Macron

Les détracteurs du nouveau monarque lui auront longtemps reproché ses faux airs de jeunesse (39 ans seulement, quand même) qui ne sauraient pourtant masquer son expérience passée. Une expérience du pouvoir et des réseaux d’influence, plus politique que strictement bancaire. Ses profonds appuis au sein du Gotha du CAC40 où le pantouflage (ces allers-retours public-privé avec parachutes dorés comme récompense pécuniaire) est la norme. Un secret de Polichinelle pour tous les français.

Les pires escrocs

On l’oublie souvent, mais les pires escrocs, dans une société, ne sont pas forcément ceux qu’on croit. Ce ne sont pas forcément ceux qu’on connaît, dont la cavale est fortement médiatisé, et qui finissent un peu comme dans un happy end moral, arrêtés, jugés et emprisonnés. Il est bien plus probable que les pires escrocs soient justement ceux qui ne seront jamais vraiment inquiétés, encore moins condamnés !

Qu’il semble loin le temps des affaires Cahuzac, Tapie ou Fillon. Place à l’affaire Bolloré. Comme si au printemps 2018 les français, en téléspectateurs-veaux, découvraient la Françafrique et prenaient conscience de la nécessaire corruption et autres prises d’intérêts illégales. « Parce que c’était elle (l’Afrique), parce que c’était moi (la France) »…

Dans le Monde Diplomatique, Anicet le Pors revient sur la stratégie Macron. Selon lui, notre super-président, après avoir mis k.o. ses opposants au printemps 2017, s’est empressé à son arrivée au pouvoir de « retourner l’ascenseur« . A qui ? A ses braves sponsors de campagne. Comment ? En accordant aux hyper-riches des cadeaux fiscaux. Et de s’empresser, histoire de ne pas trop laisser de traces dans l’opinion publique, de faire diversion.

Pour faire diversion, rien de mieux que s’attaquer aux sujets qui touchent tous les français (pas qu’une élite) et qui, au passage, divise l’opinion ! Diviser pour mieux régner… Alors tout, vraiment tout y passe : Notre-Dame des Landes, guerre en Syrie, grèves en série dans la Fonction Publique. Chaque fois, on joue sur l’émotion, on culpabilise. Et pour paraître irréprochable et totalement responsable, on s’empresse de présenter les mesures comme une espèce de fatalité historique. Dans la longue histoire de l’ultralibéralisme, qui dépasse depuis longtemps les anciens clivages droite-gauche, qui avance ses pions quoi qu’il arrive, des États-Unis à la Chine, de la France à la Grèce.

La méthode Macron n’est pas très différente de celle de ses prédécesseurs. Simplement, elle joue encore plus sur le sentiment d’urgence qui fera dire à chacun : « on a assez attendu comme ça, lui au moins il fait le boulot« . D’où un recours accru aux ordonnances. Sur la scène intérieure, le pays est resté polytraumatisé, suite aux attentats sous l’ère François Hollande, suite à la remise en question de la définition de la famille, suite aux coups de boutoir de la théorie du genre, etc.

Cette série de traumatismes dont la France de Macron a hérité, rien de mieux pour mettre en place ce que Naomi Klein appelle la Stratégie du Choc. Car il semble bien que la Nation, du moins ce qui en reste, soit en état de choc. Comme le prouve ses difficultés de se regarder dans le miroir (que fais-tu de ton école ? de ta jeunesse ? de ta place dans le monde ? de ta santé ? etc.) Sur la scène extérieure aussi, justement, le Commandant Macron ne semble pas avoir plus de vision que ses homologues. Il gère ses troupes en mode on verra bien demain.

Les atrocités se poursuivent un peu partout au Moyen-Orient, du Yémen à la Syrie et en Libye. La France ressemble à un toutou fidèle à son maître imprévisible, les États-Unis d’Amérique. Le toutou aboie bien de temps en temps, feignant le désaccord, mais au final il rentre toujours à la niche. D’après les conclusions de l’organisme onusien en charge du dossier des armes chimiques, il n’y aurait pas de présence de produits chimiques sur les sites bombardés, en Syrie, par les forces alliées. Face à ce type d’exaction, il est bien difficile de se faire une opinion.

Nous baignons dans l’info en boucle. A dessein,  nous baignons pour la plupart dans l’ignorance et la désinformation. En Syrie, on nous refait le coup des armes de destruction massives (stratagème américain dans la guerre en Iraq, du temps de Colin Powell). Alors soit nos dirigeants sont totalement manipulés, bien moins « maîtres à bord » qu’il n’y paraît – sous la coupe des états-majors et de l’OTAN. Soit, et ce n’est guère mieux, ils décident librement, à longueur de journée, de leurs exactions.

Laurent

 

 

 

4 réflexions sur “Joyeux anniversaire, ô Jupiter

  1. ben alors mon Lolo, petite désillusion ? à ce stade toutes les grandes figures politiques partagent le même DNA, appétit du pouvoir, et tactique et stratégie à géométrie variable pour y parvenir et y rester. Il y a autour un terrain plus ou moins favorable et miné, avec des alliés, des rivaux, des ennemis, des traitres, chacun pouvant passer de l’un à l’autre. Sur le damier on mesure ses forces et faiblesses, on manipule, on tend des pièges, on se fait avoir, on tombe, on recommence, on élimine…m’enfin, le petit Emmanuel, il est arrivé ou a été parachuté au bon moment au bon endroit et sa différence essentielle peut être, une intelligence affûtée avec une certaine bravoure et peut être sur le fond des valeurs morales pas encore trop décadentes et une partenaire de vie qui lui fait la leçon de temps en temps 😉

    • très petite la désillusion car j’avais déjà pas mal flairé le lancement de produit, le ciblage et le positionnement « hybride » (Monsieur « Et en même temps »). Marketing, quand tu nous tiens !! Mais on ne lui enlèvera pas qu’il parle bien (trop bien parfois, mais ça fait partie du jeu jupitérien, c’est très bien préparé, de jour comme de nuit 😉 et présente bien. Faut dire qu’en face il y a « du lourd » tant côté américain que russe ou, évidemment, chinois… Et tu as raison de souligner le soutien vital de son épouse, sans qui il ne serait peut-être jamais arrivé à ce niveau-là !

  2. D’autres diront, et j’en suis, qu’Emmanuel Macron a redonné le prestige nécessaire à la fonction présidentielle et qu’il commence sujet par sujet à insuffler une autre façon de faire. Il était temps de moderniser le pays et de redonner à tous la fierté d’être français. Le monde entier observe d’ailleurs la métamorphose française avec envie.

    • Cela s’entend en effet et il faut espérer que ce soit partagé par la grande majorité. Je ne sais pas ce que nos cousins américains ou russes pensent des échanges, pour le moment assez peu concluants (bourbier syrien, crédibilité européenne, etc.). Mais il faut peut-être attendre encore pour voir quelle issue sera trouvée (ou pas !) sur les grandes questions internationales. Car c’est là qu’on reconnaît tout le prestige et la grandeur de la fonction, le reste n’étant presque que de l’intendance générale, au plan intérieur. Au plan intérieur j’ai des doutes que les troubles actuels (pour lesquels la facilité consisterait à dire « c’est la faute aux autres » (grévistes, syndicats, corporatismes, etc.) un peu comme s’ils étaient seuls responsables de telle ou telle situation) ait renforcé l’amour-propre et l’unité de la nation française. Est-on entré dans une spirale gagnant-gagnant ou sommes-nous face à un jeu à somme nulle ? Seuls les « premiers de cordée » s’en sortent-ils mieux ? Est-ce que toute la cordée a gagné ? That is the question 🙂

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