Après des études en mathématiques, Yves Cochet devient enseignant-chercheur à l’INSA de Rennes, avant de s’engager dans la vie associative et politique. En Bretagne, il s’est engagé contre le nucléaire et pour le tramway de Rennes. Il a été député au plan national et au plan européen. Consécration suprême, au temps de la cohabitation Chirac-Jospin, Yves Cochet devient ministre. Ministre de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement, et ce pendant un peu moins d’un an.
Aujourd’hui Yves Cochet est beaucoup moins sous le feu des projecteurs. Mais il développe à qui veut bien lui tendre un micro ses idées, sa vision. Homme cultivé comme il se doit, il nous ramène à Descartes et à une certaine imposture intellectuelle. Ce concept de l’homme supérieur au reste de la Nature. Comme quoi l’homme pourrait – on y a cru très fort durant les grandes révolutions industrielles – dominer la Nature !
L’énergie est l’un de ses thèmes de prédilection – il a présidé un groupe d’étude sur les pics pétroliers et gaziers à l’Assemblée. Un jeune écolier pourrait facilement comprendre ce phénomène physique, mais côté dirigeants politiques, apparemment rien n’y fait… Retiré des affaires, Yves Cochet explique sans langue de bois que le monde a comme destin la décroissance. Un monde qu’il voit en plein effondrement, un effondrement certes lent à l’échelle de nos vies accélérées, mais un effondrement certain.
Le déclin des ressources non renouvelables est inéluctable. Les conséquences géopolitiques de la course aux hydrocarbures sont bien connue, malgré le rideau de fumée du terrorisme. Après la catastrophe industrielle de Tchernobyl, on avait cru à un « plus jamais ça », puis a eu lieu, dans un pays pourtant très riche et développé, l’explosion de la centrale nucléaire de Fukushima. L’accroissement des problèmes environnementaux en tout genre, au coût exponentiel (parlez-en aux états d’Amérique touchés par les derniers cyclones), démontre l’irresponsabilité de leurs dirigeants à courte vue.
Malgré – sinon à cause – de ses prises de position, Yves Cochet reste peu audible. Parce qu’il parle comme scientifique et homme politique. Il transcende la science – naturellement éprise de doute – pour asséner des vérités irréfutables. Notamment le constat glacial de l’insoutenabilité de nos économies mondialisées. Il nous ramène à nos faiblesses, à nos travers, à nos erreurs ou notre absence de gouvernance.
Selon cet ancien ministre, nous avons régressé dans la lutte contre le changement climatique, passant d’un protocole de Kyoto contraignant (sanctions possibles) à une COP21 purement déclarative (du vent, en somme). Mais tout cela semble bien inaudible au commun des mortels, pour qui toutes ces « mauvaises nouvelles » renforcent l’envie de « faire l’autruche ». Comme l’écrit Anne Sinaï, du collectif Momentum (présidé par Yves Cochet) : « Nous sommes embarqués dans une voiture à cent à l’heure vers un ravin, avec le pied sur l’accélérateur, mais sans trouver le frein. »
Laurent