L’autorité, une question de survie

S’il y a bien une notion passée de mode dans le monde moderne, c’est celle de l’autorité. L’autorité a été traquée comme on traquerait un vieux bandit. L’autorité a été pourchassée pour tout le tort qu’elle était sensée causer, depuis la nuit des temps ! L’autorité a-t-elle trop longtemps été vue comme un frein au changement, voire au progrès ? Qu’il nous paraît loin le temps de l’autorité religieuse ou de l’autorité politique ! Il n’y a que dans les livres d’histoire qu’on retrouve des traces de l’autorité du pape, du monarque ou du tyran.

Plus prosaïquement, nous gardons un souvenir amer de l’autorité excessive de parents ou d’éducateurs, usant et abusant de leur pouvoir sur la jeunesse… Pourtant l’autorité fait partie d’une longue tradition qui a organisé la société, mais aussi la cellule familiale, qui nous ramènent aux mœurs de l’Antiquité.

Contrairement aux idées reçues, l’autorité n’est pas une forme de violence. Autorité vient d’augere en latin, augmenter. Auctoritas signifie la capacité de faire grandir. Elle implique une confiance comme on a confiance dans le rôle du tuteur pour la plante qui y prend appui. L’autorité suppose un lien hiérarchique, une forme de subordination, un certain degré d’obéissance. Mais l’autorité suppose une légitimité, qui provient d’une expérience acquise, d’un pouvoir qui s’est construit avec le temps.

Il est souvent admis que l’autorité aurait disparu, en France, autour des événements de mai 1968. La jeune génération se serait libérée de l’ancien monde, elle aurait brisé ses chaînes et aurait proclamé qu’il était « interdit d’interdire ». En fait, la chute de l’autorité est bien plus ancienne. Le rêve révolutionnaire symbolise à lui seul un grand moment de déconstruction de l’autorité, tant au plan religieux qu’au plan politique.

Mais la Terreur, installée comme un mal nécessaire quelques années après la prise de la Bastille, permet de distinguer l’autorité et la violence, l’autorité et l’autoritarisme. L’autoritarisme est une forme dégénérée du pouvoir, qui ne sait faire autrement que de contraindre le peuple qui lui est soumis, physiquement et psychiquement. Avec l’autoritarisme, fini l’assentiment des subordonnés, place à la peur comme mode de gouvernement.

Le lent déclin de l’autorité, souvent souligné par les journalistes de la droite conservatrice, est le pendant de la croissance tranquille du libéralisme comme nouvelle valeur cardinale, dans la vie familiale, sociale et, bien sûr, économique. On pourrait évidemment remonter au siècle des Lumières, mais à quoi bon ? Le déclin de l’autorité a donné lieu à la survalorisation de l’individu, à la rupture des liens intergénérationnels. Il s’est accompagné du développement de l’indifférence et des incivilités, du désintérêt électoral, de la peur du lendemain et de la perte de repères.

Que reste-t-il à l’autorité ? Il lui reste le bon sens, celui de parents aimant leurs enfants et respectant leur statut infantile. C’est au travers du défi quotidien de l’éducation, en famille et scolaire, que l’autorité doit se battre contre la fatalité. Lutter contre la démission de l’autorité parentale, contre la défiance systématique des adultes vis-à-vis des règles et des limites.

L’autorité a subi, en continuer d’endurer, une forme de désamour, de décote voire de raillerie permanente. Pourtant, comment imaginer une société abandonnant ses enfants à l’utopie de l’autogestion, à la négociation permanente, au contournement systématique des règles ? Comment espérer un quelconque vivre ensemble dans la sphère sociale si, dans la sphère familiale, règne déjà le chaos ?

Laurent

Lire aussi : https://www.lefigaro.fr/vox/politique/2016/06/17/31001-20160617ARTFIG00088-derriere-le-desastre-francais-la-crise-de-l-autorite-de-l-etat.php

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