Voici une petite histoire de l’homme. Animal prédateur de taille moyenne, doté d’une intelligence exceptionnelle et d’un instinct de conquête incroyable…
A l’école ou à la maison, très jeunes les enfants apprennent le nom des animaux.
Dans les livres ou au zoo, à la ferme parfois ou en pleine nature plus rarement, ils découvrent qu’il n’y a donc pas que l’homme comme animal sur terre ! Sans la nommer, ils découvrent l’évidence de la bioversité. Dans leur imaginaire se fixent des animaux « gentils » et d’autres animaux, « méchants ».
La Fontaine avait bien compris, en son temps, la puissance de la métaphore entre les animaux et les hommes. On installe une sorte de hiérarchie des animaux, des plus faibles aux plus forts.
Puis un beau jour le mot est lâché : prédateur ! Très vite les lions, les tigres, les aigles, les requins sont rangés dans cette catégorie suprême et quelque peu terrifiante ! Sans oublier les minuscules moustiques, qui tuent bien plus d’humains chaque année que tous les autres prédateurs réunis…
A la question « quel est le plus grand prédateur sur terre ?» la réponse ne se fait guère attendre. Après une légère hésitation, la réponse enfantine tombe : « c’est l’homme ! »
La prédation fait bon ménage avec quelques autres « qualités » humaines comme l’arrogance, l’égoïsme, la violence, l’irrespect. Elle s’illustre dans quelques inventions typiquement humaines comme la dictature, l’esclavage, la colonisation, l’exploitation. Bel héritage historique ! La conscience humaine a beaucoup progressé depuis. Tout n’est pas réglé, mais le monde actuel est beaucoup moins violent si on considère la violence des hommes sur d’autres hommes.
Il faut dire que Mao (n°1 des charts), Staline et consorts avaient vraiment placé la barre très haut. Au XXIème siècle, on n’a heureusement pas fait pire. Par contre la violence sur soi-même (décès par suicide et maladies causée par le tabagisme, l’alcool, etc.) et sur notre environnement connaissent une vraie croissance, ce sont des « valeurs sûres » contemporaines. Et qu’on ne s’y méprenne pas : la prédation reste parfaitement soluble dans la démocratie moderne. Comment en est-on arrivé là ?
Il y eut d’abord l’homme préhistorique, celui du Paléolithique. Prédateur ou proie ? Peu nombreux à l’échelle terrestre, vulnérable et peu organisé d’abord et pendant des millénaires, il faut essayer de se le remémorer aujourd’hui. Devoir de mémoire impossible ? Comment au Néolithique notre homme est-il sorti de sa vulnérabilité, comment est-il devenu si puissant au point de finir par régner seul sur terre ? Enfin… calmons-nous !
Il ne faudrait peut-être pas aller trop vite en besogne, ne pas se risquer à quelque conclusion hâtive comme le proposent les partisans de « l’accident » ou la « parenthèse » sur terre que celle de l’espèce humaine. En tout cas, en attendant, quelques arbitrages, quelques choix d’organisation et de mode de vie changeront sa vie à jamais ! Ces choix seront certainement lents, avec une multitude d’essais-erreurs. Le passage de la chasse et de la cueillette à l’exploitation du vivant. Le passage aussi du nomadisme à la sédentarité, et l’approfondissement de la « marque » de notre passage, appelée aujourd’hui « empreinte écologique ».
Exploiter, n’est-ce pas le début de l’institutionnalisation de la prédation de l’homme sur tout le reste de ce qui l’entoure ? La prédation se fera d’abord à une toute petite échelle, au niveau animal et végétal, un peu minéral aussi (pour son outillage). Ce n’est que beaucoup plus tard que la prédation va s’intensifier, lorsque les villes vont être construites « en dur », que l’homme va découvrir de quoi accélérer le mouvement avec le charbon puis le pétrole.
Et encore plus tard, avec le nucléaire, ce concentré d’énergie qui nous ferait presque oublier la non moins merveilleuse énergie de l’astre du jour (qui en fait brille jour et nuit si on regarde les choses globalement !) Toujours plus d’énergie concentrée, voilà le génie de la nature capturé par le génie de l’homme. Et dans cet élan, quelques scientifiques et politiques illuminés (voire carrément « allumés ») iront jusqu’à se lancer dans ce projet un peu fou : recréer l’incroyable fusion nucléaire, mais cette fois de manière artificielle et sur terre…
Le progrès technique a permis le passage de l’ère agricole et artisanale à l’ère industrielle, et la généralisation de la consommation, l’homme étant de plus en plus libéré des contraintes du passé (communication, transports, mécanisation, etc.) Au passage l’homme laisse de plus en plus de traces de son passage sur terre, mais qui s’en soucierait, tant que les effets perçus positivement sont supérieurs aux traces de cette dégradation ? Tout est question d’impression, plus que de chiffres ou de faits bruts.
Et l’impression que les efforts longs sont devenus inutiles, puisque nous vivons dans une société « effortless » et de l’instantané. Jouissance immédiate sans trop se soucier du lendemain. Regardons l’exemple de celui qui travaille la terre en la respectant, en la laissant se régénérer, sans tricher par quelques adjuvants dont les effets positifs ne sont que passagers et qui rendent le paysan prisonnier. Toute sa vie ne sera qu’efforts longs, mais toute sa vie lui seul pourra profiter des plaisirs renouvelés : du goût des produits naturels, du goût, de la diversité, du beau, du sain. Et en faire partager son entourage. Non pas des clients situés à 500, 1000 ou 3000 kilomètres, mais simplement des habitants de sa région, « comme avant ».
Laurent
Pingback: Victimes consentantes et anthropocentrisme | light up my mind
Pingback: Obscurantisme… et après ? | light up my mind
Pingback: La malédiction des matières premières | light up my mind